L’absentéisme de longue durée s’envole dans les entreprises !

Le taux d’absentéisme en entreprise a globalement reculé en 2023, mais reste toujours très supérieur à la période pré Covid. Dans le même temps, les arrêts de longue durée sont en forte progression. Une véritable problématique pour les entreprises, avec un manque à gagner estimé à 100 milliards d’euros par an !

absentéisme au travail 2024
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Après trois années particulièrement bousculées par le contexte sanitaire, le taux d’absentéisme en entreprise a diminué en 2023, mais il reste toujours bien supérieur à la période pré Covid. C’est l’un des principaux enseignements que l’on peut retenir du nouveau baromètre Ayming et Ag2r La Mondiale, publié au début de ce mois de juin.

Ainsi le taux d’absentéisme, qui correspond au nombre de jours de travail manqués par rapport aux jours travaillés théoriques, s’est établit à 6,1% en 2023, contre 6,7% un an plus tôt. En 2019, ce taux atteignait 5,54%. De plus, la part des salariés ayant connu au moins une journée d’arrêt au cours de l’année a quant à elle fortement baissé entre 2022 et 2023, passant de 47% à 37%. Mais ce taux s’était établit à 35% en 2019, preuve encore une fois que sur le temps long, l’absentéisme progresse dans les entreprises

Dans les entreprises du secteur du commerce, le taux d’absentéisme s’est établit à 5,72% en 2023. Toujours dans le commerce, la part des salariés ayant connu au moins une journée d’arrêt en 2023 s’est établit à 34%. Soit un niveau en dessous de la moyenne nationale.

Les arrêts de longue durée en forte augmentation

Plus problématique encore pour les entreprises, le baromètre d’Ayming et Ag2r La Mondiale met en évidence une augmentation significative du taux d’absentéisme de longue durée, qui progresse de 16% entre 2022 et 2023, et même de 31% en l’espace de seulement 5 ans ! Un phénomène visible dans tous les secteurs, et qui touche aussi toutes les classes d’âge, même si les séniors (plus de 51 ans) sont logiquement les plus représentés dans cette catégorie.

Près d’un senior sur dix s’est absenté pour plus de 90 jours consécutifs en 2023.

En revanche, la poly-absence – qui concerne les salariés ayant connu 3 absences ou plus dans l’année – a été en recul en 2023, s’établissant à 15% du total de l’absentéisme, contre 18% en 2022. Mais là encore, ce taux reste supérieur à la période pré Covid, et pèse de plus en plus sur la vie quotidienne des entreprises, alors même qu’elles font face ces dernières années à des difficultés accrues de recrutement. A l’image de ce que constate Stéphane, gérant d’un bar/restaurant à Marseille, et qui emploie jusqu’à 20 personnes au plus fort de la saison estivale. « Même si je suis de plus en plus vigilant sur mon recrutement, il y a toujours un ou deux salariés qui vont régulièrement se mettre en arrêt maladie pour une raison ou une autre. Ca va commencer par un mal à la tête, puis un autre jour ce sera une douleur dans le bras, et ce n’est pas rare que ça finisse en burn out au bout de même pas deux mois… Le problème c’est qu’en tant que chef d’entreprise ça nous contraint à devoir trouver une solution de dernière minute, au détriment de notre vie personnelle très souvent, et mentalement ça devient de plus en plus usant à gérer », partage-t-il.

Un témoignage qui fait écho chez les commerçants, qui sont de plus en plus nombreux à faire face à ce problème. « J’ai l’impression que ça s’est aggravé ces dernières années, à tel point que certains ne prennent même plus la peine de justifier leurs absences », regrette Elodie, gérante d’un salon de coiffure à Calais.

Constatez-vous également dans votre entreprise une augmentation de l'absentéisme ces dernières années ?

100 milliards d’euros de manque à gagner pour les entreprises

Le désarroi des chefs d’entreprises n’est pourtant pas prêt de s’arrêter. En effet, d’après les prévisions de nombreux experts, cette tendance à l’augmentation globale de l’absentéisme devrait s’accélérer dans les années à venir. A l’heure d’aujourd’hui, on estime déjà qu’à l’échelle de la population active, l’absentéisme au travail représente 1,3 million d’emplois perdus. Pour les entreprises françaises, le manque à gagner est ainsi estimé à 100 milliards d’euros par an ! Sans compter le coût que cela fait peser sur les comptes de l’Assurance Maladie, déjà fortement dans le rouge !

Les arrêts de travail représentent, en moyenne, près de six équivalents temps plein pour une entreprise de 100 salariés.

Pour tenter d’inverser la tendance, le gouvernement a récemment envisagé plusieurs solutions, et notamment l’augmentation du nombre de jours de carence quand les salariés sont en arrêt maladie. Dans le système actuel, les salariés du privé ont trois jours de carence en cas d’arrêt maladie, c’est-à-dire qu’ils doivent attendre le quatrième jour pour que la sécurité sociale commence à les indemniser. Pour réduire les dépenses, l’exécutif envisage d’allonger la durée de carence à 7 jours. Mais pour le moment, rien de concret n’a encore été présenté, d’autant que le contexte politique actuel, suite à la dissolution de l’Assemblée Nationale, pourrait rebattre complétement les cartes.

Lire aussi : Congés payés acquis pendant un arrêt maladie : Quelles obligations pour l’employeur ?

Quelles solutions pour les chefs d’entreprises ?

En attendant une hypothétique mesure gouvernementale, les entreprises peuvent déjà prendre le problème à bras le corps, en mettant en place des actions concrètes au sein de leur établissement. A l’image de Léonie, qui emploie 12 personnes dans sa franchise de prêt-à-porter féminin, à Toulouse, et a réussi à faire baisser l’absentéisme en récompensant la présence au travail. « Il y a 3 ans, j’ai décidé de mettre en place une prime d’intéressement basée sur le présentiel, et rapidement j’ai pu constater que ceux qui avaient tendance à s’absenter pour les petits soucis de la vie que nous avons tous (enfants malades, rendez-vous personnels…) se sont mis à trouver des solutions », explique-t-elle.

En parallèle, elle a aussi décidé d’être proactive lors de chaque absence injustifiée. « C’est quelque chose que je ne laisse plus du tout passer. Si il ou elle n’a pas de justificatif, je n’hésite pas à prendre des sanctions en fonction de la situation. L’année dernière, j’ai même décidé de licencier pour faute grave une de mes salariées qui s’absentait régulièrement sans justificatif. Cela n’a pas été simple, il a fallu respecter une procédure assez longue pour être sûre que je sois bien dans mon droit, mais l’avantage c’est que cela a mis un coup de pression à l’ensemble de mon équipe », poursuit elle.

« En tant qu’employeur, nous avons la possibilité de contrôler le bien fondé d’un arrêt maladie. Quand on a un doute, il ne faut pas hésiter à demander une visite de contrôle, c’est notre droit »

Avant de sanctionner, Sarah, consultante en ressource humaine, recommande de son côté de parvenir à trouver une issue par le dialogue. « Un salarié qui s’absente régulièrement est souvent une personne qui a perdu de la motivation, il faut réussir à la remobiliser, chercher à comprendre pourquoi elle s’absente aussi souvent et tenter de trouver une solution par le dialogue, c’est aussi ça le rôle d’un chef d’entreprise. Après, bien entendu, si la personne fait preuve de mauvaise foi, il faut rapidement prendre les devants et sanctionner », conclut-elle.

Le cas échéant, il est vivement recommandé de vous faire accompagner par un professionnel, que ce soit un avocat spécialisé dans le droit du travail, votre cabinet comptable ou vous pouvez également vous rapprocher de votre syndicat professionnel.

Lire aussi : Comment faire face aux arrêts maladies à répétition d’un salarié ?

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