Commerce de proximité : « Les gens nous ont vite oubliés »

Au tout début de la crise, la population a pris conscience de l’importance de consommer local. Or, pour la plupart des consommateurs ce n’était qu’éphémère. Depuis six mois, nombre de commerçants font face à une baisse de la fréquentation. Le contexte général, inflation, guerre et relent de la crise sanitaire, est en cause et les aides ne sont plus qu’un mirage pour la plupart des commerçants.

Bruno Manuel a photographié en 2019 des façades de commerces fermés, certains depuis des décennies. En France, en Belgique, en Italie, aux Pays-Bas et en Espagne.

« Nous sommes complètement oubliés, absence totale de clientèle, il faut vraiment qu’il se passe quelque chose sinon c’est plié on va tous fermer, LA SITUATION EST DRAMATIQUE », commente en majuscule le fleuriste “A Fleur de Pot ” sur le site du média lechommerces.fr. Un constat partagé par Patricia Lippens, de la boutique ” Telle mère telle fille ” : « Bilan catastrophique, le dernier confinement a été le coup de massue. Les clientes ne s’habillent plus avec le télétravail et les sorties se font rares. » Un constat partagé dans l’habillement par Carole Vallet, gérante d’un magasin de prêt à porter dans l’Allier « c’est plus que calme et c’est pareil dans ma rue : magasin de chaussures, esthéticienne, magasin de sport de glisse, magasin de second main, bar, fleuriste et un magasin de graphisme… ».

Tous les secteurs d’activités sont touchés !

Des témoignages similaires publiés en nombre chaque jour dans le groupe d’entraide des commerçants et qui proviennent de différents métiers, analyse une confrère, Ginie Noya : « Ce sont tous les secteurs d’activités qui sont touchés par cette crise. “Essentiels et non essentiels”. J’ai un commerce dans la bijouterie, accessoires de mode, maroquinerie et déco, c’est la cata… personne dans les rues du centre-ville, il faudrait peut-être que le gouvernement regarde ce qui se passe dans la vie “réelle”. On est tous en train de sombrer. Il y a des augmentations de partout (électricité, carburants, courses), du jamais vu. Et ne parlons pas du télétravail, les gens ont pris d’autres habitudes, ils ne consomment plus comme avant. A force de leur faire peur, ils ne sortent plus, ils n’ont plus envie d’acheter… », analyse-t-elle.

Aurélie Paget, gérante du centre d’épilation Blossom à Reims, confirme et précise : « Effectivement tous les commerces sont concernés, dans les salons de beauté nous avons subi les annulations avant les fêtes, les gens ne voulaient pas “l’attraper“. En novembre, c’était la crainte de savoir si on allait refermer. Et ensuite les cas contacts et les cas Covid, donc annulations sur annulations….  » Des annulations en nombre également chez les traiteurs et dans la restauration, Patricia Chassoux témoigne ainsi : « Resto ouvriers : 50% de chiffre en moins et tous les repas prévus annulés…, pas de chômage partiel…, tout va bien … y en a marre…, on va crever sans avoir rien demandé. » Isabelle Le Guen Couleurs de swing” évoque des pistes pour expliquer cette consommation en baisse dans tous les domaines : « En gros, nous sommes sclérosés dans nos vies depuis 2 ans ! Fatigue morale, physique, absence de liens sociaux, sorties inexistantes, peur de l’avenir, maladie, peur du virus, peur du vaccin, … » Et pour les commerçants « peur de faire faillite », analyse-t-elle, tandis qu’un confrère parisien confirme et complète « les années d’élections ne sont jamais bonnes pour le commerce, avec le Covid et l’Ukraine ça tourne à la catastrophe ».

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Victor Boissard, gérant d’une épicerie indépendante de produits sans emballages et locaux, évoque lui « une descente aux enfers depuis les vacances de février. J’ai ouvert il y a 9 mois, la situation était déjà compliquée mais il y avait une progression. J’ai perdu des clients sans comprendre pourquoi. Le centre-ville est désert, même constat pour les autres commerces, même inquiétudes chez mes producteurs locaux qui enregistrent une chute de fréquentation de 40% sur les marchés depuis mai 2021. Difficile de suivre et de comprendre les attentes des clients… » Alain Aubriot, disquaire indépendant, esquisse lui une explication et une solution « depuis plus 30 ans on a pu mesurer l’érosion du commerce de centre-ville. Cela n’est pas évident, nous notre survie on la doit à la vente en ligne qui représente plus de 50 % de notre C.A. La façon de consommer a changé, il faut s’adapter, nous n’avons pas le choix. Il faut continuer à se battre 💪💪 mais aussi savoir s’arrêter et rebondir avant de tout perdre ».

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Si les commerçants ont le sentiment d’être abandonnés par les consommateurs, ce sentiment vaut aussi pour le gouvernement, qui a tout juste saupoudré de mesures d’aides certaines professions, alors que la période est critique pour des milliers de commerçants. Rappelons tout de même que nombre d’entre eux ont pu tenir grâce aux mesures prises lors des derniers confinements imposés. Alors que le premier tour des élections présidentielles approche à grand pas et que dans un contexte de sortie de crise sanitaire et d’un retour de l’inflation l’économie est plus que jamais au cœur des préoccupations, quel est le candidat qui propose selon vous, un programme capable de dynamiser l’activité des indépendants ? Autrement dit, pour quel candidat les commerçants vont-ils voter le 10 avril ?

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