Abandon de poste : Le conseil d’Etat précise la nouvelle réglementation

Une présomption de démission en cas d’abandon de poste a été introduite par la loi Marché du travail. Pour cela, l’employeur doit tout de même respecter une procédure stricte, comme l’a récemment confirmé le Conseil d’Etat. Explications détaillées.

Abandon de poste
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Les abandons de postes sont de plus en plus nombreux en France, à tel point qu’ils sont devenus une véritable problématique pour les employeurs, mais aussi pour Pôle Emploi. Selon les derniers chiffres publiés par le ministère du Travail, 123 000 abandons de postes ont ainsi été recensés pour le seul premier semestre 2022 ! Dans cet ensemble, 94% des salariés concernés étaient en CDI, au sein de TPE et PME en grande partie.

Face à l’ampleur du phénomène, le pouvoir législatif avait décidé d’encadrer plus strictement l’abandon de poste, via la loi Marché du travail du 21 décembre 2022. Une loi promulguée le 18 avril 2023, et qui n’a cessé d’être remise en cause par les syndicat de salariés, sans succès. Dans une décision rendue le 18 décembre 2024, le Conseil d’Etat a ainsi rejeté les diverses demandes d’annulation de la loi. Tout en apportant des précisions sur les modalités d’application de cette réforme. Explications détaillées.

Qu’est-ce qu’un abandon de poste ?

Même s’il n’en existe pas de définition à stricto sensu dans le Code du travail, l’abandon de poste se caractérise aujourd’hui par l’absence injustifiée ou répétée d’un salarié pendant ses heures de travail. Le délai minimum pour caractériser un abandon de poste est généralement autour de 48h. A noter que des absences ponctuelles ou étalées sur plusieurs jours peuvent aussi être considérées comme un abandon de poste.

En revanche, l’abandon de poste ne s’applique pas lorsque le salarié quitte son poste de travail sans autorisation de l’employeur pour l’un des motifs suivants :

  • Consultation d’un médecin justifiée par son état de santé.
  • Décès d’un proche.
  • Droit de retrait (ce droit peut être invoqué par un salarié lorsque la situation de travail dans laquelle il se trouve présente selon lui un danger grave et imminent pour sa vie ou pour sa santé).

Que change la nouvelle réglementation ?

Avant le 18 avril 2023, lorsque vous souhaitiez en tant qu’employeur vous séparer d’un salarié qui avait abandonné son poste, vous étiez contraint de procéder soit à un licenciement pour cause réelle et sérieuse (le salarié conservait alors son droit au préavis et son indemnité de licenciement), ou à un licenciement pour faute grave. Dans ce second cas de figure, le salarié était alors privé de ses indemnités de licenciement et de préavis. Mais cela restait un licenciement, ce qui lui permettait in fine de pouvoir prétendre tout de même à une allocation chômage. Face à cette dérive, le législateur a introduit dans la loi Marché du travail une présomption de démission en cas d’abandon de poste.

Concrètement, l’employeur a désormais la possibilité de mettre en demeure le salarié, par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge, lui demandant de justifier son absence et de reprendre son poste dans un délai de 15 jours calendaires. A défaut de réponse dans ce délai, le salarié est présumé avoir démissionné, ce qui ne lui permet plus de bénéficier de l’allocation chômage. Dans ce cas de figure, le préavis de démission ne sera ainsi pas exécuté, et l’employeur n’aura donc pas d’indemnité compensatrice à verser au salarié. Dans sa récente décision, le Conseil d’État souligne la nécessité pour l’employeur de bien préciser l’ensemble de ces points dans son courrier remis au salarié présumé démissionnaire. De manière à ce que ce dernier soit bien informé explicitement des conséquences de son inaction.

A noter que cette procédure n’est pas obligatoire, l’employeur conserve toujours la possibilité de licencier le salarié qui a abandonné son poste pour faute grave.

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Quel recours possible pour le salarié ?

De son côté, le salarié conserve toujours la possibilité de contester cette « présomption de démission », en avançant par exemple des raisons médicales, son droit de grève ou son droit de retrait. Dans le même temps, « le salarié qui conteste la rupture de son contrat de travail sur le fondement de cette présomption peut saisir le conseil de prud’hommes. (…) Il statue au fond dans un délai d’un mois à compter de sa saisine », précise le décret d’application de la loi.

Dans ces cas, si le conseil de prud’hommes confirme que le ou les motifs invoqués par le salarié sont légitimes, ce dernier n’est pas tenu de reprendre son travail tant que l’employeur n’y aura pas remédié.

Une procédure stricte

Dans ce contexte, et même si la décision du Conseil d’Etat apporte une sécurité juridique aux entreprises, les employeurs doivent plus que jamais adopter une procédure rigoureuse pour éviter tout litige. Et notamment de veiller à ce que l’abandon de poste soit volontaire et non lié à un motif légitime. De même, il est primordial de bien vérifier au préalable que les mises en demeure soient claires et conformes au cadre légal. En cas de non-respect, la présomption de démission pourrait être contestée devant les tribunaux.

Dès lors, pour ce type de procédure, il est vivement recommandé de vous faire accompagner par un professionnel, que ce soit un avocat spécialisé dans le droit du travail, votre cabinet comptable ou vous pouvez également vous rapprocher de votre syndicat professionnel.

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