Forte hausse des faillites : les commerçants font preuve de résilience
Le nombre de défaillances d’entreprises au 1er trimestre 2024 est au plus haut depuis 10 ans ! Une hausse qui masque de fortes disparités, territoriales tout d’abord, avec certaines régions très impactées, mais aussi sectorielles, les commerçants faisant dans l’ensemble davantage preuve de résilience. Explications et analyses détaillées par département.
L’effet rattrapage du Covid se poursuit en ces premiers mois de 2024. Après des années 2020, 2021 et même 2022 particulièrement calmes sur le front des défaillances d’entreprises, les faillites repartent nettement à la hausse depuis 2023. Et le 1er trimestre 2024 poursuit sur cette lancée. C’est en tout cas l’un des principaux enseignements du dernier rapport d’activité du cabinet Altares. « 17 088 entreprises sont tombées en défaillance entre le 1er janvier et le 31 mars 2024, soit une hausse de 19,4% par rapport à la même période de 2023. La France se rapproche ainsi de sa sinistralité de début 2015 », analyse ainsi Altares.
Dans cette ensemble, les TPE constituent toujours l’essentiel des défauts (92%), avec 15 600 TPE de moins de 10 salariés qui sont tombées en défaillance. « Mais le rythme décélère : un peu moins de 19% d’augmentation des défauts contre plus de 42% au T1 2023 », précise Altares. En revanche, le bilan est plus contrasté pour les PME-ETI. 1 444 sociétés d’au moins 10 salariés ont ainsi fait défaut au cours de ce 1er trimestre 2024, en augmentation de 28% ! La situation est encore plus tendue pour les PME de plus de 50 salariés. 154 ont fait l’objet d’une procédure collective, un nombre au plus haut depuis plus de dix ans. Le nombre d’ouvertures de procédures collectives flambe ainsi de 58% chez les PME de 50 à 200 salariés !
Évolution du nombre de défaillances d’entreprises en France sur 10 ans
Le commerce et l’hôtellerie/restauration font de la résistance
Alors qu’elles avaient été particulièrement impactées en 2023, les entreprises du commerce et de l’hôtellerie/restauration font cette fois preuve de davantage de résilience en ce 1er trimestre 2024. Et ce malgré un contexte économique toujours défavorable depuis la rentrée 2023. Les commerces de bouche notamment, en première ligne face à la flambée des prix des matières premières agricoles et de l’énergie, résistent particulièrement bien. Dans la boulangerie, les défaillances d’entreprises sont ainsi en baisse de 12% (275 boulangeries) par rapport au 1er trimestre 2023. Il en est de même pour la boucherie, où l’on recense “seulement” 105 ouvertures de procédures collectives, soit une baisse de 25% !
La restauration retrouve également des couleurs, après deux années très compliquées. Les défaillances augmentent encore, mais de “seulement” 12% en restauration rapide (781 établissements) et 9% (981 établissements) dans le service à table. « Rappelons que ce dernier accusait des hausses de plus de 110% début 2022 et encore +50% début 2023 », détaille Altares dans son étude. De même, les défaillances d’entreprises ne sont qu’en légère augmentation dans l’hébergement (+8,9% ; 122 établissements), signe que le secteur CHR retrouve une meilleure dynamique depuis le début de l’année.
Autre secteur qui retrouve des couleurs, après des années 2022 et 2023 particulièrement difficiles, la coiffure qui affiche à peine plus de +5 % de défauts (325 établissements). Dans le même registre, les instituts de beauté connaissent également une hausse limitée de faillites dans leur secteur.
A l’inverse, la situation reste encore tendue pour certains secteurs du commerce, comme les activités immobilières qui présentent des évolutions très lourdes. « Ainsi, le nombre de défaillances d’agences immobilières a quasiment doublé ce trimestre (374 établissements ; +95%), comme un an plus tôt », constate Altares. De très mauvais chiffres à mettre en lien direct avec les difficultés du secteur de la construction, et plus généralement de l’ensemble du marché immobilier, qui touche par ricochet celui du bricolage et l’équipement du foyer. 310 ouvertures de procédures collectives ont ainsi été recensées dans ce secteur au 1er trimestre 2024, soit une hausse de 62,3%.
Enfin, la vente au détail d’habillement reste sous tension, tout en limitant la dégradation à +22 % (350 entreprises) après une année 2023 là encore très difficile.
Des régions plus touchées que d’autres
Si des disparités importantes s’observent sur le plan sectoriel, il en est de même au niveau territorial, notamment en Ile-de-France, qui accuse une augmentation de +30% du nombre de défaillances d’entreprises (4 000 établissements). « Trois départements franciliens sont particulièrement sous tension : les Yvelines (+53 %) ; le Val-de-Marne (+63 %) et la Seine- Saint-Denis (+58 %) », détaille Altares. La Corse également enregistre de mauvais chiffres, franchissant la barre des 100 défauts ce premier trimestre 2024 (122), en augmentation de 39% par rapport au début d’année 2023.
Trois régions se situent entre +20% et +25%. La Provence-Alpes-Côte-d’Azur approche 1 800 défauts d’entreprises (1 784 entreprises ; +21 %), un nombre proche de celui observé début 2016. En détail, Le Var et les Alpes-de-Haute-Provence enregistrent une hausse sévère, au-delà de +50 %. Les Hautes-Alpes et le Vaucluse se situent au-delà de 20 %. Les Alpes-Maritimes et les Bouches-du-Rhône proches de 10% tirent en revanche la performance régionale.
La Normandie compte 667 défaillances d’entreprises (+21%). L’Eure contient l’augmentation sous 10% et l’Orne et la Seine-Maritime sous 20%. En revanche, la hausse dépasse 30% dans le Calvados et approche +50% dans la Manche !
L’Auvergne-Rhône-Alpes franchit de son côté la barre des 2 100 défauts (2 104 ; +24%). Deux départements sont très sévèrement orientés, la Haute Savoie (+61%) et l’Allier (+55%). La Haute-Loire, le Cantal, la Loire et l’Ain se situent dans une fourchette de +30% à +40 %. L’Ardèche et l’Isère sont autour de +25%. Le Puy-de-Dôme et le Rhône tombent sous les +20% et la Savoie 10%. Enfin la Drôme se distingue et parvient à stabiliser le nombre de ces défauts d’entreprises.
Carte d’évolution des défaillances par région au 1er trimestre 2024
Six régions contiennent la hausse des défauts sous la moyenne de 20%. En tête de celles-ci, la Bourgogne Franche-Comté (582 défauts ; +11%). Près de la moitié des défaillances se concentrent sur deux départements : la Côte d’Or (+23%) et la Saône et- Loire (+29%). Mais la Haute-Saône enregistre une évolution plus forte (+30%). Si le Jura stabilise le niveau de ses défaillances, le Doux (-3%) et le Territoire de Belfort (-16%) font encore mieux.
Le Grand Est (1 151 défauts ; +12%) présente des évolutions locales très contrastées. Les Vosges approchent +60%, la Meurthe et Moselle et la Meuse sont au-delà de +40%. À l’inverse Le Bas-Rhin, la Moselle et le Haut-Rhin tombent nettement sous les +10%. L’Aube et la Haute-Marne font mieux, avec un recul d’environ -30% !
Les Pays de la Loire repassent de leur côté au-dessus de 700 défauts (722 ; +14%). Le Maine-et-Loire et la Vendée enregistrent des hausses de plus de 20%. La Loire-Atlantique affiche +10%. La Mayenne et la Sarthe sont en dessous des +10%.
En Bretagne, 653 défaillances ont été enregistrées ce premier trimestre, en augmentation de 17%. La dégradation est tirée par le Morbihan et l’Ille-et-Vilaine (+30%).
Le Centre Val-de-Loire compte 588 défaillances d’entreprises (+18%), un nombre au plus haut depuis début 2016. Le Loir-et-Cher est plus lourdement affecté (+68%), devant l’Eure-et-Loir (+40%) et le Loiret (+32%). L’Indre (+14%) se situe sous la moyenne régionale. L’Indre-et-Loire (-8 %) et le Cher (-12%) sont quant à eux favorablement orientés.
L’Occitanie est en ligne avec la moyenne nationale, juste sous les +20%, pour 1 573 défaillances. Trois départements affichent des augmentations au-delà de 30% : le Gard (+45%), les Hautes-Pyrénées (+37%) et l’Aveyron (+33%). L’Hérault et le Tarn se situent à +25% et l’Ariège un peu en dessous. Les autres départements contiennent la hausse sous les +20%, notamment la Haute-Garonne (+17%). Quatre d’entre eux passent même sous les +10% : L’Aude, les Pyrénées-Orientales, le Tarn-et-Garonne et le Lot.
Enfin, deux régions se démarquent par leur forte résistance : les Hauts-de-France (+6 %) et la Nouvelle Aquitaine (+10 %). En Hauts-de-France, plus de la moitié des 1 244 défauts sont concentrés dans le département du Nord qui contient la hausse à seulement +5%. La Somme fait mieux (-5%). L’Oise signe la moins bonne performance (+21%).
En Nouvelle-Aquitaine, un gros tiers des défauts se concentre en Gironde qui accuse une dégradation de +25%. Le Lot-et-Garonne et les Landes sont également au-dessus de +20%. Mais c’est la Charente-Maritime qui présente l’évolution la plus lourde (+34%). À l’inverse, la hausse est sous les 10% dans les Pyrénées-Atlantiques, la Charente et les Deux-Sèvres.
Comment va évoluer la situation dans les mois à venir ?
Malgré ces chiffres dégradés dans l’ensemble pour ce 1er trimestre 2024, le cabinet Altares se montre tout de même assez confiant pour le reste de l’année 2024. Et pour cause, à l’instar de l’inflation, le rythme des défaillances semble lui aussi ralentir à l’entame de ce printemps. « A la faveur d’une conjoncture qui redeviendrait progressivement un peu plus accommodante, l’année 2024 s’achèverait sur un nombre de défaillances, sauvegardes comprises, en hausse de 10% proche donc des 64 000 procédures, un nombre élevé mais pas un mur de faillites », anticipe ainsi Thierry Millon, directeur des études chez Altares.
Des prévisions plutôt rassurantes, et qui font écho aux derniers chiffres d’activités publiés dernièrement par les fédérations du commerce, faisant état d’un regain de l’activité au mois de mars 2024. Reste à savoir si cette amélioration s’inscrira dans la durée, avec en perspective l’espoir d’une saison estivale réussie ! Affaire à suivre.
Lire aussi : Classement des meilleures villes françaises pour les commerces indépendants
Restez informés de l’actu pour les commerçants et indépendants :
Cet article vous a été offert !
Abonnez-vous et soutenez le média qui défend les commerçants indépendants.
Je m’abonne
Certes l’état distribue bien trop et taxe énormément aussi ; oui les clients n’ont pas suffisamment de pouvoir d’achat, mais ils ont aussi une autre façon de consommer et achètent donc sur des sites bien moins chers ou tendent vers la seconde main! Ce qu’ils oublient tous c’est que nous petits professionnels nous les faisons travailler, percevoir leur salaire et par ailleurs ils vont le dépenser dans des sites étrangers, alors qu’ils ne viennent pas se plaindre quand il n’y aura plus de commerces et surtout qu’ils n’auront plus de boulot !
Et dire que si nous n’avions pas un “modèle français” aussi généreux en “redistribution” de prestations sociales, nous aurions un pression fiscale-sociale bien moindre et pourrions peut être survivre plus facilement. Mais voilà, il faut redistribuer…
on résiste mais à quel prix?
Que se soit l’inflation ou les faillites, on ne parle que de la baisse de l’augmentation et bien évidemment tout va aller mieux.
[…] Le nombre de défaillances d’entreprises au 1er trimestre 2024 est au plus haut depuis 10 ans ! Une hausse qui masque de fortes disparités, territoriales tout d’abord, avec certaines régions très impactées, mais aussi sectorielles, les commerçants faisant dans l’ensemble davantage preuve de résilience. Explications et analyses détaillées par département dans notre article dédié, en cliquant ici. […]
département du Doubs pas doux