Pour eux aussi il est question de survie !

Subissant des conditions économiques défavorables depuis des années, des milliers de commerçants vivent au jour le jour. Les mesures annoncées ne vont pas empêcher les faillites et les lourdes conséquences sociales qui en découlent.

Question-de-survie

Les jours passent, la crise s’enracine et les inquiétudes, pour ne pas dire les angoisses des commerçants dont les magasins restent désespérément fermés, ne diminuent pas. Certes des mesures ont été prises par le gouvernement, le report des charges va permettre à nombre d’entre eux de survivre, du moins quelques semaines, le temps que l’épidémie soit sous contrôle, mais après ? Les commerçants qui ont une trésorerie solide vont pouvoir rebondir dans quelques mois, lorsque l’économie se sera remise en marche. Mais combien de commerçants peuvent tenir et combien de temps faudra-t-il avant un retour à la normale ?  Nul besoin d’être prévisionniste pour savoir qu’une grande partie des commerçants déjà fragilisés par des conditions économiques peu favorables depuis des années, vont devoir baisser le rideau. Déjà les conséquences économiques du mouvement des gilets jaunes ont été lourdes pour nombre de commerces qui ne s’en sont toujours pas remis. Les trésoreries sont exsangues et depuis plusieurs mois des milliers de commerçants vivent au jour le jour, contraints de gérer leur entreprise à la petite semaine, comme en témoigne les centaines de témoignages recueillis dans notre pétition pour la suppression des charges. Et si ce blocage économique impacte tous les secteurs d’activité, il tombe au plus mal pour certaines professions et particulièrement pour les commerçants du secteur de la mode, mais aussi de la restauration et d’une manière générale pour tous les commerces déjà en sursis.

Des entrepreneurs fragilisés économiquement et moralement

A situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles, mais en l’état les mesures prises par le gouvernement ne vont pas empêcher tous ces commerçants de mettre la clé sous la porte. Et face à la propagation de l’épidémie, dans le contexte actuel d’annonces quotidiennes de centaines de décès et de milliers de personnes infectées par le coronavirus, le gouvernement peut-il vraiment répondre à cette autre urgence ?  Après tout il ne s’agit que de difficultés économiques, il n’est pas ici question de vie ou de mort. Certes, mais tout dépend de la définition et du sens que l’on donne à la vie. Si l’on est capable de mobiliser toute une nation, de créer un élan de solidarité et si des milliers de personnels soignants se muent en héros pour tenter de sauver quelques années de vies à quelques milliers de personnes fragiles, ne peut-on pas mobiliser aussi les ressources nécessaires à la survie de milliers de personnes actives ? Et, pour ces actifs, il s’agit bien de parler de survie. Qui n’a jamais porté une entreprise à bout de bras et subi le vertige, face au gouffre de la faillite, ne peut pas comprendre. Comme beaucoup d’entrepreneurs indépendants, les commerçants ont leur activité chevillée au corps, ils vivent leur affaire au quotidien et dans leurs tripes et lorsque leur entreprise est propulsée vers le précipice, ils appellent au secours. Et ceux qui crient sont souvent ceux qui ont encore la force de crier. Les autres subissent : pressions incessantes des banques et des fournisseurs, surcharge continue de travail, absence de salaire, dettes que l’on multiplie « pour tenir », quand on y arrive ! Comment envisager sa vie lorsque l’on n’a plus de salaire, sans droit au chômage et qu’il faut en plus rembourser les cautions ? Les assignations d’huissiers s’accumulent, mais il n’y a pas d’argent. Certains tombent en dépression, d’autres sauvent les meubles, il y a « des bouches à nourrir », il faut trouver en urgence un logement social, expliquer aux enfants, se justifier face au conjoint…

Des milliards annoncés, mais des miettes pour les commerçants

Si le gouvernement a consenti un geste envers les indépendants, notre société n’a pas vraiment pris conscience que nos entrepreneurs, ces forces vives de la nation, n’ont aucun filet de sécurité. Les commerçants en font partie, aujourd’hui pour beaucoup leur survie est en jeu, mobilisons-nous ! Des milliards d’euros sont injectés en quelques jours, pour soutenir l’économie, mais les critères d’attribution ont-ils bien été évalués ? Devons-nous accorder des milliards d’aides aux entreprises qui font depuis des années de confortables bénéfices et qui se sont constituées des trésors de guerre nichés dans des paradis fiscaux. L’argent est le nerf de la guerre dit-on, notre Président l’assure « il n’y aura pas de faillite à cause du coronavirus », mais concrètement aujourd’hui des dizaines de milliers de « petits entrepreneurs » ne bénéficient pas d’un soutien financier leur permettant d’assurer leur survie. La plupart des mesures visent à reporter les échéances, mais des milliers de commerçants reportent déjà leurs échéances de mois en mois ! Il faut supprimer ou abaisser fortement toutes les charges durant quelques mois. Impôts, prélèvements sociaux, loyers, crédit, taxes locales… ces frais doivent être réduits au minimum. Et pourquoi pas demander aussi la contribution des assurances, des supermarchés, des géants de l’e-commerce ? Après tout, en temps de guerre, les secteurs qui souffrent le moins, ne devraient-ils pas eux aussi faire un effort ? N’oublions pas que derrière chaque vitrine, chaque comptoir, des hommes et des femmes luttent et des familles souffrent. Alors même s’il faut toute proportion gardée, là aussi il y a des vies à sauver !

Philippe Maurel. Directeur de la publication l’echommerces et gérant de sociétés depuis 1989

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