Faillites : les entreprises du commerce font preuve de résilience

Le nombre de défaillances d’entreprises est en hausse au 2eme trimestre 2024. Une augmentation qui masque des disparités, territoriales tout d’abord, mais aussi sectorielles, les commerçants faisant dans l’ensemble preuve de résilience. Explications et analyses détaillées par départements.

faillites France
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La mauvaise conjoncture actuelle pèse sur les entreprises françaises. C’est en tout cas l’un des principaux enseignements du dernier rapport d’activité du cabinet Altares. « Le nombre d’ouvertures de procédures de sauvegarde, redressement et liquidation judiciaire de ce printemps est élevé (16 371), très au-dessus de la moyenne observée de 13 700 sur les décennies 2000 et 2010. Ce nombre découle d’une conjoncture ralentie et du rattrapage d’une partie des défauts évités pendant la crise sanitaire grâce aux aides », analyse ainsi Altares.

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A noter tout de même que les 3/4 de ces défaillances (12 000) concernent des microentreprises de moins de 3 salariés, qui enregistrent une augmentation des défauts de 26,4%. Les PME de 50 à 99 salariés sont également sévèrement touchées. Elles affichent une augmentation très rapide du nombre de défauts (+48%) et elles subissent aussi une forte poussée des liquidations judiciaires (+91%). « 30% de ces 80 PME se concentrent dans deux activités, le transport routier de marchandises et la sécurité privée », précise le cabinet Altares.

Évolution du nombre de défaillances d’entreprises en France sur 10 ans

défaillances entreprises sur 10 ans
En données glissées sur 12 mois, la barre des 63 500 cessations de paiement a été franchie au mois de juin.

Les commerçants font de la résistance

Alors qu’elles avaient été particulièrement impactées en 2023, les entreprises du secteur du commerce font cette fois preuve de davantage de résilience en ce second trimestre 2024. Et ce malgré un contexte économique toujours défavorable depuis le début de l’année. Les commerces de bouche notamment, en première ligne face à la flambée des prix des matières premières agricoles et de l’énergie, résistent particulièrement bien. Dans la boulangerie, les défaillances d’entreprises sont ainsi en baisse de 1,2% (250 boulangeries) par rapport au 1er trimestre 2023, confirmant la trajectoire plus favorable amorcée en début d’année 2024.  Il en est de même pour les magasins multi-rayons (épiceries, superettes, supermarchés), pour lesquels le niveau de défaillance est en baisse de 1,5% (265 défaillances).

Autre secteur qui retrouve des couleurs, après des années 2022 et 2023 particulièrement difficiles, le commerce de prêt-à-porter, qui enregistre à peine plus de 250 procédures au second trimestre 2024, un nombre en retrait de 7,7% sur un an. La coiffure poursuit de son côté son long rétablissement, mais compte encore près de 300 procédures, soit 5,7% de plus sur un an. La situation est en revanche plus tendue pour les salons de beauté, qui comptent 168 procédures, en augmentation de 18,3%.

Toujours dans le commerce de détail, la situation est toujours compliquée ce trimestre pour le véhicule automobile (300 défaillances : +30%), le meuble (85 défaillances ; +60%), la pharmacie (30 défaillances ; +76%), ou encore les agences immobilières (290 défaillances ; +58%), en lien avec les difficultés du secteur de la construction. Dans le commerce de gros, la plupart des activités sont aussi dans le rouge, notamment la boisson (34 défaillances ; +79%) ou le mobilier domestique (16 défaillances ; +45%).

Des tendances contrastées dans l’hôtellerie / restauration

Dans le secteur de l’hôtellerie / restauration, la restauration traditionnelle reprend son souffle avec 777 procédures ouvertes ce deuxième trimestre (+1,3%), soit seulement une dizaine de plus qu’un an plus tôt. La situation ne s’inverse en revanche pas dans la restauration rapide, qui compte 824 jugements, un nombre en augmentation de 27,6%. La situation est également problématique pour les débits de boissons (296 défaillances ; +12,1%), mais surtout dans l’hébergement, qui voit le nombre de défaillances exploser (117 défaillances ; +50%).

Des régions plus touchées que d’autres

Si des disparités importantes s’observent sur le plan sectoriel, il en est de même au niveau territorial, avec quatre régions qui connaissent une forte hausse des défaillances. En tête de celles-ci, la Normandie qui accuse une augmentation de 38,5% pour 640 procédures. « Une situation tirée par les mauvaises performances de la Seine-Maritime (259 défaillances ; +57%) et du Calvados (181 défaillances ; +68%) que ne peut compenser le recul de la Manche (59 défaillances ; -14%) », précise Altares.

En deuxième position, l’Ile-de-France qui affiche une augmentation de 34%, pour 4182 défauts, un nombre jamais approché depuis plus de 25 ans. Si Paris tente de résister (1102 défaillances ; +14%), les tendances sont en revanche lourdes pour la Seine-Saint-Denis (774 défaillances ; +74%), le Val-de-Marne (383 défaillances ; +56%), les Hauts-de- Seine (368 défaillances ; +47%) ou la Seine-et-Marne (683 défaillances ; +36%).

La Bourgogne enregistre 543 défauts, soit une sinistralité en hausse de 32,4%. La région retrouve un niveau de défaillances au plus haut sur dix ans. Si les jugements se stabilisent dans le Jura (38 défaillances), ils augmentent très fortement dans l’Yonne (95 défaillances ; +102%). La Saône-et-Loire est également à la peine (108 défaillances ; +40%).

La Nouvelle Aquitaine ferme la marche avec une hausse de 30,3%. La région compte 1525 procédures. « Les défauts reculent en Dordogne (71 défaillances ; -16%), se stabilisent ou augmentent peu en Creuse et Deux-Sèvres. La situation est en revanche particulièrement tendue dans la Vienne (84 défaillances : +53%) et en Gironde (616 défaillances ; +60%) », détaille Altares.

Cinq régions sont proches de la moyenne française

L’Auvergne-Rhône-Alpes est un peu au-dessus de la moyenne nationale (+24,2%, contre +23,4%). La région compte près de 1900 procédures ce 2e trimestre. Trois départements sont stables, le Cantal, l’Isère et la Haute-Loire, tandis que l’Allier affiche même un recul (-4%). En revanche, la situation est très tendue dans l’Ain (176 défaillances ; +102%) et en Savoie (180 défaillances ; +51%).

La Provence-Alpes-Côte-d’Azur dépasse de son côté les 1600 défaillances d’entreprise (1616 défaillances ; +21,6%). Les défauts se stabilisent dans le Vaucluse (153), tandis qu’ils augmentent de plus de 20% dans les Alpes-Maritimes (409 défaillances ; +23%), le Var (335 défaillances ; +22%) et les Bouches-du-Rhône (639 défaillances ; +26%).

En Bretagne, 575 défaillances ont été enregistrées ce deuxième trimestre, en augmentation de 21,3 %. La tendance est tirée par le Morbihan (147 défaillances ; +24 %) et l’Ille-et-Vilaine (197 défaillances ; +27 %).

La Corse passe la barre des 100 défauts (109 défaillances ; +21,1%), et retrouve la sinistralité du printemps 2019.

Le Grand Est (1108 défaillances ; +20 %) offre une belle résistance à l’ouest de son territoire. Les Ardennes, l’Aube et la Marne affichent une quasi-stabilité du nombre de défauts par rapport au T2 2023. A l’est, le rythme est également encourageant avec des augmentations de 10% dans le Bas-Rhin (244 défaillances) et 19% dans le Haut- Rhin (166 défaillances). La situation est plus compliquée en Meurthe-et-Moselle (156 défaillances ; +51%) et en Meuse (56 défaillances ; +250%).

Carte d’évolution des défaillances par région au 2e trimestre 2024

faillites entreprises par région en 2024
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Deux régions contiennent la hausse des défauts entre 10% et 20%

Les Pays de la Loire (678 défaillances ; +17,3%) affichent des tendances locales contrastées. Ainsi, la Mayenne (44 défaillances) enregistre un recul (-2%) du nombre de défauts, tandis que la Loire-Atlantique (249 défaillances ; + 4%) et la Vendée (130 défaillances ; +6%) enregistrent une faible hausse. A l’inverse, le rythme accélère dans la Sarthe (93 défaillances ; +39%) et le Maine-et-Loire (161 défaillances ; +53%).

Le Centre Val-de-Loire compte de son côté 514 défaillances d’entreprise (+13,2 %). Le Loir-et-Cher affiche un net recul (51 défaillances ; -20%), mais aussi le Cher (56 défaillances ; -8%), tandis que l’Indre-et-Loire limite la hausse à +6% (139 défaillances). A l’inverse, l’Indre accuse une forte augmentation (37 défaillances ; +61%). L’Eure-et-Loir (107 défaillances ; +32%) et le Loiret (127 défaillances ; +31%) sont également à la peine.

Deux régions tombent sous les +10%

En Hauts-de-France, les deux premiers départements font mieux que résister. Ainsi, le nombre de défaillances recule de 9% (483 défaillances) dans le Nord, et il est quasiment stable (+2%) dans le Pas-de-Calais (239 défaillances). La sinistralité augmente en revanche rapidement dans l’Oise (167 défaillances ; +40%) et plus encore dans la Somme (137 défaillances ; +74%).

L’Occitanie offre la meilleure tendance métropolitaine (1356 défaillances ; +6,5%). La moitié des départements passe au vert. Le nombre de défauts recule dans le Tarn-et-Garonne (-4%), le Tarn (-6%), le Gard (-9%) et l’Aveyron (-10%). La baisse dépasse -30% dans le Lot, les Hautes-Pyrénées et la Lozère. Dans l’Hérault, le chiffre est quasi stable (293 défaillances) contrairement aux Pyrénées-Orientales (+38%), qui comptent 166 procédures. C’est l’Ariège qui ferme la marche, le département dérape de 63% avec 44 jugements.

L’outre-mer est conforme à la tendance globale

En Outre-mer, le nombre de défaillances augmente de près de 22%. La Guyane affiche même un chiffre en recul de 12,5% (14 défaillances). La Martinique contient la hausse sous les 10% (103 défaillances ; +7,3%) et la Guadeloupe sous +20% (88 défaillances ; + 17,3%). La Réunion est plus sévèrement orientée (292 défaillances ; +33,9%).

Comment va évoluer la situation dans les mois à venir ?

A ce stade, difficile de faire des prévisions précises, tant le niveau d’activité économique est soumis à de nombreux aléas conjoncturels (politique, social, international…). « La faiblesse de la conjoncture handicape les sociétés fragilisées par une dette Covid non entièrement réglée. Si les PME et ETI présentent globalement une vulnérabilité moindre que lors des mois précédents, les PME restent en fragilité », analyse Thierry Millon, directeur des études chez Altares. Concluant par ailleurs : « Dans une économie en panne, il est difficile de tenir pour ces employeurs de nos territoires. L’hypothèse des 64 000 défauts pour 2024 partagée en début d’année reste à ce stade envisageable ». Affaire à suivre.

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