Tribune – « Et si on préparait l’avenir dans nos commerces »

Jean-Pierre Lehmann, Président des Vitrines de France, appelle les commerçants à préparer l’avenir dès aujourd’hui.

Jean-Pierre Lehmann

La crise sans précédent que nous vivons provoque l’incertitude du lendemain. C’est pourquoi il m’est difficile de comprendre les déclarations péremptoires et contradictoires des uns et des autres. En ce qui concerne « les Vitrines de France » nous avons beaucoup de difficulté à nous retrouver dans la cacophonie des déclarations des différentes instances représentant le commerce. Et pour cause :

Qui connait aujourd’hui les conditions dans lesquelles nous pourrons rouvrir les points de vente ? A quelle date exacte et avec quelles restrictions d’accessibilités ?* Soldes ou pas soldes, est-ce que les consommateurs pourront ou oseront s’entasser dans des lieux de commerce ?

Qui connait aujourd’hui les priorités de ces mêmes consommateurs ? Comment peut-on penser sérieusement qu’il y aura une frénésie d’achats dès l’ouverture des portes comme si rien ne s’était passé ? Quelles seront les priorités des consommateurs ?

Qui connait aujourd’hui les réactions individuelles de chacun des commerçants et qui peut croire qu’une réglementation éventuelle par les soldes serait respectée par tous alors que chacun voudra, à sa façon, « sauver sa peau » et ceci par tous les moyens qu’il jugera approprié ?

Bien avant cette crise, le comportement de bon nombre de consommateurs avait déjà évolué : on voulait consommer « responsable », « durable », « écologique », « proximité ». On voyait déjà se développer des points de vente virtuels ou physiques de locations, d’occasions, d’échanges, etc. A l’évidence ce mouvement, du fait de cette crise, va croître et embellir et la plupart des points de vente n’y sont pas préparés. C’est pourquoi nous n’imaginons malheureusement pas une ruée sauvage dans les points de vente notamment ceux de l’équipement de la personne (et encore moins pour ceux qui ont une clientèle âgée). Nous pensons qu’il y aura aussi d’abord un réflexe d’épargne chez beaucoup de Français(e)s qui préféreront se constituer ou renforcer « leurs bas de laine » pour des périodes qui s’annoncent pour le moins incertaines.

La nécessité d’anticiper l’après confinement

En conclusion, plutôt que des débats stériles, il est prioritaire que les commerçants utilisent à plein la période actuelle pour se préparer, se former notamment à la vente à distance, organiser dès maintenant leur point de vente afin de répondre aux mesures d’hygiène qui seront imposées, prévoir avec tous leurs partenaires (mairies, chambres consulaires, managers de centre-ville, etc…) les moyens pratiques notamment de livraison (à domicile, dans des points relais « drive urbain », consignes, etc…) à préparer avec leurs associations de commerçants des outils d’animation commerciale (communication, fidélité, chèques cadeaux, fichiers clients, applications mobile ou site internet…) afin d’inciter les clients à reprendre le chemin de leurs points de vente et d’une façon générale des centres-villes.

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Malheureusement, beaucoup de commerçants ne survivront pas à cet épisode relativement dramatique. A l’évidence, non, rien ne sera plus comme avant, nous sommes rentrés brutalement dans une nouvelle époque. Quant à notre action aux Vitrines de France, comme nous l’avons toujours fait depuis le début, elle continuera à être de trouver et de proposer des solutions concrètes à toutes les problématiques actuelles et futures. La donne a changé, à nous tous, ensemble, de nous y adapter.

Jean-Pierre Lehmann, Président de la Fédération Nationale des Centres-Villes.

* Il y aura bien entendu des mesures générales comme le nettoyage régulier de toutes les surfaces de contact, le port de masques, de visières, d’écrans protecteurs entre clients et commerçants, la mise à disposition de gants, de gel hydroalcoolique, l’accessibilité réduite suivant la taille du magasin, et d’autres mesures que nous oublions. Mais qu’en sera-t-il des mesures particulières en fonction des types de commerces et de métiers qui nécessitent de la proximité ? Comment feront les opticiens pour vendre leurs lunettes, comment feront les esthéticiennes pour s’occuper de leurs client(e)s ? Aura-t-on le droit d’essayer des vêtements dans les boutiques de prêt-à-porter ? Comment les kinésithérapeutes pratiqueront leurs soins ? Et comment feront tous les autres praticiens ? Ce ne sont que quelques exemples parmi la foule de questions auxquelles nous n’avons pas de réponses aujourd’hui. Une chose est sûre, il va falloir que l’on informe précisément chacune de ces professions, et par ricochet les clients et les patients, des nouveaux comportements qu’ils devront adopter.