L’appel des commerçants indépendants

3 commerçants, qui se sont connus par les circonstances du confinement, publient aujourd’hui une tribune pour porter la voix des indépendants. Une tribune que nous vous invitons à cosigner, pour toutes celles et ceux qui se reconnaissent dans ce texte.  

Tribune commerçants

La France compte environ 3 millions de TPE à ce jour, soit environ 5 millions de travailleurs toutes catégories confondues. 
Cela représente 1 300 milliards d’euros de chiffre d’affaires, soit 9 % du PIB français. Les TPE et indépendants participent largement à l’économie de la France, à sa richesse et son attractivité.

Et derrière chacune de ces richesses, il y a un humain. Depuis des années et des mois, cet être est déconsidéré et humilié. La multiplication des crises traversées par notre pays a fragilisé nos structures sans que jamais l’État ne nous soit venu en aide. Et ceci pour une simple raison : nous sommes une entité économique résiliente, qui accepte, qui accuse le coup, qui est humble, raisonnable et responsable. Et ceci, les pouvoirs publics le savent.
Cependant, ce qui était à peine supportable jusque-là, n’est plus concevable aujourd’hui avec cette nouvelle crise. La tension monte et l’insurrection guette. Et ceci peut nous desservir car nous avons sans nul doute des âmes d’entrepreneurs, mais pas celles de révolutionnaires. Nous avons appris à nous méfier des confédérations et syndicats et travaillons tous de manière isolée. Voici justement la force des pouvoirs publics face à nous. Nous sommes seuls et désolidarisés.
Voici pourquoi encore, aucune considération ne nous est accordée, nous sommes relégués au rang de 3e ligne, celle qui reste chez elle pour ne pas aggraver la situation. Et du coup, cette 3e ligne est complètement abandonnée, faute de crier assez fort. Aucun pan de la population n’est plus mal considéré que le nôtre.

Et pourtant, nous ne faisons que rapporter à ce pays, nous ne lui coûtons rien… Les salariés ont automatiquement des droits, si ce n’est le télétravail payé à 100 %, ce sera au moins le chômage partiel payé à 84 %. Les chômeurs continuent à obtenir leurs indemnités (aussi faibles soient elles), les retraités n’ont pas changé de traitement et même les chômeurs en fin de droit continuent à être indemnisés. Et tant mieux !
Alors, effectivement, des aides parcimonieusement bien choisies sont égrainées régulièrement. Mais les conditions d’obtention sont sélectives et il faut passer des heures à quémander et, ensuite, des jours à attendre le bon vouloir des administrations pour le versement de ces aides ! Et quelles aides ? 1500 euros ? Et encore, le tout assorti de conditions de chiffre d’affaires par rapport à N-1, ce qui peut se traduire par rien ou seulement quelques centaines d’euros, qu’il nous faut mendier et pour lesquels nous devons engager notre honneur (vérifiable par la suite, cela va sans dire, tant notre honneur est déconsidéré…)
Certes, chaque aide est la bienvenue et nous n’allons pas cacher notre demi-soulagement le jour où cette aide va nous parvenir. Mais nous n’allons pas non plus cacher notre déception et notre catastrophisme face à cette mesure qui ressemble plus à un acte de charité qu’à un acte de sauvetage.

Mais nous ? Nous en notre qualité d’être humain ?

Car oui, ces aides sont les bienvenues, mais en plus d’être largement insuffisantes, à la limite de l’insignifiance vu l’état dans lequel nos entreprises sortiront de cette crise, elles ne nous sont pas destinées à nous, les chefs d’entreprise, nous les êtres humains derrière chaque numéro de Siret !

Et c’est là que nous nous rendons bien compte que nous sommes au ban de la citoyenneté française ! Rien n’a été prévu pour nous… Comme si la bataille que nous devons livrer aujourd’hui pour sauver nos entreprises ne suffisait pas, nous devons désormais gérer notre condition d’humain, et non plus seulement celle d’entrepreneur, et mener de front les deux combats. La France compte aujourd’hui 5 millions de chômeurs. Si seulement 8 TPE sur 10 réussissent à surmonter cette crise, (ce qui est très optimiste sur les 2 ans à venir, convenons-en) c’est environ 1 million de chômeurs en plus. Et les grandes entreprises, avec la meilleure intention du monde, ne pourront pas absorber ce chiffre, et encore moins l’administration.

Nous avons été réduits au statut d’ « activités non indispensables » et de 3e ligne ! Et pourtant, nous sommes bien plus indispensables qu’on veut bien nous le faire croire et nous le faire ressentir. Nous devons nous battre aujourd’hui pour notre survie personnelle, demain pour la vie de nos entreprises et après-demain pour leurs pérennités respectives. Et cela commence par un accompagnement de la part de nos administrations, des pouvoirs publics et de nos partenaires à qui nous avons fait confiance jusque-là.

Ainsi notre combat doit être le suivant :

Lutter contre la lourdeur et la lenteur administrative

  • Le délai de traitement entre la demande et le déblocage des fonds est d’une lenteur insupportable dans certaines parties du territoire sous prétexte de non-conformité de coordonnées des comptes en banque ou autres. La seule réserve que pourrait mettre en oeuvre l’administration serait celle de l’éligibilité ou non via l’attestation sur l’honneur. L’aide n’étant pas fiscalisée, il n’y a pas de raisons valables à la lenteur du traitement de ces données ni au au déblocage des fonds. D’autant plus que les trésoreries des sociétés étant majoritairement négatives, cette somme, versée sur un autre compte permettrait de payer les dépenses urgentes. Ce pour quoi cette aide est destinée. La plupart des demandes ont été effectuées dès le 30 mars, et ne sont toujours pas traitées à ce jour.
  • Le délai de traitement et surtout de règlement des dossiers de chômage partiel est également beaucoup trop long sans aucune raison audible. Nos salariés ont besoin de leur salaire et beaucoup d’entreprises déjà en difficulté avant la crise n’ont plus les moyens de les avancer.
  • Les indemnités de chômage partiel des salariés doivent être désormais versées directement sur leur compte en banque et non sur celui de l’entreprise. Voici qui soulagerait l’employeur de manipulations supplémentaires inutiles puisque, quoi qu’il en soit, les indemnités ainsi versées ne sont pas soumises à cotisations sociales ou fiscales.
  • Il est urgent de mettre en place un canal d’information unique via un portail officiel qui recensera nos informations et en permettra la diffusion auprès des administrations concernées. Cela évitera de renouveler les démarches et d’avoir à chaque fois un interlocuteur différent. Dans le même esprit, ce canal permettra de centraliser les informations et démarches disponibles à notre intention.

Nous demandons l’automaticité de certaines démarches
Cette automaticité ayant été annoncée mais pas appliquée, cela a des conséquences qui peuvent être multiples. Comme les créanciers de leur côté continuent le recouvrement de leurs créances, comme si tout allait bien sans coronavirus, cela entraîne selon les cas, des frais bancaires qui s’accumulent, des résiliations de prêts, des agios, des intérêts de retard. Cette situation fragilise encore plus nos trésoreries déjà mal en point compte tenu de la fermeture obligatoire. 

  • Automaticité de l’attribution du fonds de solidarité pour les mois suivants tant que l’ordre de fermeture est actif.
  • Automaticité de l’arrêt des prélèvements sur les comptes bancaires. A chacun de décider via un contact avec les fournisseurs comment il désire régler ses factures ; les échéances des prêts, les factures d’énergie (qui exigent une formalité lourde), les échéances mensuelles des assureurs. Nous demandons également qu’aucune rupture de fourniture d’énergie ou de couverture d’assurances (sociales, mutuelles, professionnelles) n’ait lieu, sous prétexte de non-paiement sans accord préalable.
  • Automaticité de l‘interdiction de frais bancaires lié aux incidents de paiement ou de frais d’intervention jusqu’à nouvel ordre.
  • Automaticité du report des prélèvements de prêts mobiliers et immobiliers jusqu’à nouvel ordre.
  • Automaticité de la suspension de la facturation des fournitures ne pouvant être consommées : frais bancaire de location TPE, les box internet, droits de la SACEM etc.

Tout ceci sauf ordre contraire du débiteur. 

Réévaluation des aides et éligibilité
Il nous a été promis des aides pour nos entreprises mais l’administration ne suit pas ou fait du zèle. Aucune entreprise ne devait rester au bord de la route, et pourtant, à chaque demande d’aide, des conditions d’obtention se cumulent jusqu’à exclure beaucoup trop d’entrepreneurs.

  • Nous demandons à ce que la seule condition applicable soit liée à l’ordre de fermeture par les pouvoirs publics ou par la baisse de chiffre d’affaires supérieure à 50 %.
  • Nous demandons une aide forfaitaire selon le nombre de salariés, le chiffre d’affaires réalisé, la valeur locative du local occupé, et ceci, sans exclure les structures sans salariés, les structures sans local ou les auto-entrepreneurs au faible chiffre d’affaires.
  • Nous demandons, à titre particulier et en notre qualité, non pas de chef d’entreprise, mais en notre qualité de citoyen, comme tout un chacun actuellement sur le territoire français, une aide personnalisée forfaitaire selon nos charges familiales et nos ressources habituelles.
  • Nous demandons à ce que les charges reportées à ce jour soient purement annulées et ceci, pour toutes les charges qui se présenteraient durant la période de fermeture obligatoire.
  • Nous demandons un effort tout particulier des assureurs pour prendre en charge à minima une partie de notre perte d’exploitation. Un effort que nous voudrions évaluer entre 15 et 20 % de la perte d’exploitation. Cette perte serait cumulable avec les aides forfaitaires de l’État.
  • Nous demandons à l’État de garantir les prêts de trésorerie à hauteur de 100 % pour les entreprises désireuses d’assurer leur avenir grâce à ces prêts. Le cas échéant, nous demandons à l’État de contraindre les banques dans la mesure du possible à accepter des dépassements de découvert. Trop de banques usent actuellement de pression sur des entreprises déjà en difficulté avant la crise.
    Ainsi, nous demandons à l’État de prendre en considération que beaucoup de TPE ont souffert des différentes crises successives ces derniers mois sans demander d’aides particulières, ou en tout cas, sans en avoir obtenu, et présentent par conséquent des fragilités qui servent trop souvent de prétexte aux refus des banques .

TOUTES LES ENTREPRISES ET TOUS LES INDÉPENDANTS À TITRE PERSONNEL EN ACTIVITÉ AU 15 MARS 2020 DOIVENT POUVOIR PROFITER DE CES AIDES RAISONNABLEMENT ET SANS EXCLUSION TEL QUE L’A PROMIS NOTRE MINISTRE DE L’ÉCONOMIE . « AUCUNE ENTREPRISE NE SERA LAISSÉE AU BORD DE LA ROUTE »

Tribune signée par : 

Patrick Fetter, gérant de deux restaurants, à Lyon

Kerstin Schönberg, commerçante non sédentaire, à Nancy

Stéphane Devèze, gérante d’un Kid store jouets/prêt-à-porter, à Paris

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