Combien les employeurs doivent-ils débourser pour augmenter un salarié de 100 euros ?
Une récente étude pointe du doigt le coût exorbitant dont doivent s’acquitter les employeurs pour augmenter le revenu disponible net de leurs salariés rémunérés au niveau du Smic. Explications.
Antoine Bozio (directeur de l’IPP et chercheur associé à l’École d’économie de Paris) et Étienne Wasmer (professeur à l’université de New York Abu Dhabi et professeur associé à Science Po), viennent de présenter les premiers résultats de leur mission « relative à l’articulation entre les salaires, le coût du travail et la prime d’activité et à son effet sur l’emploi, le niveau des salaires et l’activité économique ». Une étude qui met en évidence le phénomène de trappe à bas salaires qui touche particulièrement la France en raison de son modèle social.
La trappe à bas salaires, c’est quoi ?
La trappe à bas salaires se définit comme une situation dans laquelle un employeur, pour continuer à bénéficier d’avantages particuliers (réductions de cotisations sociales, fiscalité réduite…), maintient la rémunération de ses salariés à un bas niveau. Dans le même temps, le salarié a lui aussi peu intérêt à voir la rémunération issue de son travail augmenter, dans la mesure où cette hausse de salaire engendre la diminution, voire même la perte de ses avantages sociaux, tandis que sa fiscalité augmente. Dès lors, ni l’employeur ni le salarié n’ont réellement intérêt à une hausse de salaire brut, ce qui alimente ainsi ce mécanisme de trappe à bas salaire. En France, ce phénomène prend chaque année de l’ampleur. 17% des salariés sont au Smic aujourd’hui, alors qu’ils n’étaient que 12% en 2021.
Un effet pervers du système français que le Premier ministre lui-même a mis dernièrement en avant lors d’une intervention télévisée : « Entre la prime d’activité et les allègements de cotisations patronales qui ont été mis en place, on a un système qui fait qu’il n’y a plus beaucoup d’intérêt pour quiconque à augmenter les salariés au Smic, a déploré Gabriel Attal. L’employeur, ça lui coûte très cher, et le salarié va gagner moins ». Pour enrayer cette dynamique, le gouvernement a missionné deux économistes, Antoine Bozio et Étienne Wasmer, pour dans un premier temps mesurer le poids de cette trappe à bas salaire en France. Et les premiers résultats qui en ressortent son édifiants. Si un employeur veut augmenter de 100 euros le revenu disponible de l’un de ses salariés rémunérés autour du SMIC, il doit dépenser à minima 238 euros de plus, et selon les situations, jusqu’à près de 600 euros !
Comment expliquer un tel surcoût ?
Les différents calculs mis en avant par les deux économistes s’appuient en fonction de différents profils de salariés, au regard de leur situation familiale, patrimoniale, ou encore le type d’emploi et lieu de résidence. Avec des écarts qui peuvent fortement varier en fonction de ces divers paramètres. Mais il n’en reste pas moins qu’augmenter un salarié rémunéré au niveau du Smic a un coût conséquent. « Aujourd’hui, pour augmenter de 100 euros le revenu d’un employé au Smic, l’employeur doit débourser 238 euros de plus. Quant au salarié, il perd 39 euros de prime d’activité, il voit sa CSG et ses cotisations augmenter de 26% et il rentre dans l’impôt sur le revenu », a ainsi illustré Gabriel Attal, lors de sa déclaration de politique générale, en se basant notamment sur le simulateur de l’Urssaf pour calculer les charges patronales et salariales, ainsi que sur un autre simulateur mis à disposition par la Caf, pour tout ce qui est relatif aux prestations sociales.
Les salariés rémunérés au Smic ne sont d’ailleurs pas les seuls concernés par cette trappe à bas salaires. L’étude d’Antoine Bozio et Étienne Wasmer révèle également que le coût d’une augmentation de revenu disponible net de 100 euros pour un salarié (après impôt et cotisations sociales) est encore plus élevé pour les salaires légèrement au dessus du Smic. En cause notamment, la disparition progressive des prestations sociales, et l’imposition qui se fait de plus en plus importante pour les salariés. A partir d’une rémunération supérieure à 1,6 Smic, c’est cette fois le niveau des charges salariales et patronales qui explose…
Lire aussi : Impôts et charges sociales : La France championne d’Europe !
Comment mieux rémunérer ses salariés sans augmenter l’imposition et les charges sociales ?
Alors que le rapport final des deux économistes est attendu pour la fin du mois de juin, Gabriel Attal a déjà annoncé que des mesures pour augmenter les bas salaires seront présentées prochainement, sans faire peser le poids sur les entreprises. « Je souhaite que dans le prochain budget, en 2025, il puisse y avoir des mesures pour garantir une plus forte incitation à augmenter les bas salaires », a-t-il expliqué. Affaire à suivre de près.
En attendant, plusieurs dispositifs sont aujourd’hui accessibles aux entreprises afin de mieux rémunérer leurs salariés, et ce sans augmentation de charges sociales pour l’employeur, ni hausse d’impôts et baisse de prestations sociales pour les salariés. Tour d’horizon des principaux mécanismes qui peuvent être facilement utilisés par les entreprises, et notamment les commerçants, à retrouver dans notre article dédié.
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Bonjour,
Selon mon constat, sur mon bulletin de salaire, une augmentation de 100€ bruts sur mon salaire impliquerait un coût total pour l’entreprise de 80% de plus, soit 180€.