Les assurances vont-elles finalement assurer la perte d’exploitation ?

Le gendarme de l’assurance vient de lancer une enquête sur les contrats français afin de déterminer si les pertes d’exploitation liées à l’épidémie peuvent être couvertes ou non par les assurances.

perte exploitation restaurant

Alors que depuis le début de la crise du Covid-19 les assureurs répètent sans relâche que les pertes d’exploitation ne peuvent être prises en charge, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), le gendarme de l’assurance, a annoncé qu’elle allait enquêter sur les principaux contrats commercialisés par les assureurs. Et notamment en ce qui concerne la couverture des pertes d’exploitation. « En raison de la crise épidémique et de ses conséquences, un certain nombre de secteurs économiques connaissent des chutes d’activité importantes dont certaines pourraient être couvertes par des garanties de perte d’exploitation vendues par des assureurs », écrit l’autorité de surveillance dans un communiqué.

Un avis rendu d’ici juillet

Concrètement, l’ACPR va examiner les principaux contrats, ainsi que les différents types de garanties proposées et les sinistres pris en compte. « Les premiers enseignements tirés de cette analyse seront soumis au collège de l’ACPR dans les prochaines semaines de juin et juillet », souligne l’autorité. Mais son rapport ne devrait pas changer fondamentalement la donne. « Je précise tout de suite que notre rôle n’est pas de dire le droit des contrats, ceci relève du juge civil, notre rôle est à la fois d’éclairer sur la situation prudentielle [des assureurs] et d’éclairer les consommateurs sur leurs droits », a tenu à préciser le président de l’ACPR, François Villeroy de Galhau. En clair, il faudra se retourner individuellement contre son assureur pour tous ceux qui estiment que leurs droits ne sont pas respectés.

Certains n’ont d’ailleurs pas attendu l’annonce de l’ACPR pour entamer ces démarches, à l’image notamment de Stéphane Manigold, gérant de quatre restaurants à Paris, qui a assigné AXA devant le tribunal de commerce de Paris. Une action collective vient également d’être lancée par Elias Bourran et Amélie Robine, tous deux avocats au Barreau de Paris. L’objectif, là aussi, est d’aider les chefs d’entreprises à obtenir l’indemnisation de leurs pertes d’exploitation. Et pour cause, alors que de plus en plus d’assureurs ont débloqué ces derniers jours des sommes considérables pour dédommager en partie les pertes d’exploitation, de plus en plus de professionnels du droit s’inquiètent de ces pratiques qui pourraient, dans certains cas, aller à l’encontre de l’intérêt de l’assuré. « Le risque que je vois en ce moment c’est que les assureurs vont essayer d’endormir leurs clients avec des primes, certes parfois conséquentes, alors même que certains chefs d’entreprises auraient tout intérêt à être plus exigeants au vu des garanties présentes dans leur contrat », s’inquiète ainsi Jérôme Pinturier, avocat au Barreau de Marseille.

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Même les acteurs de l’assurance se désolidarisent aujourd’hui sur ce sujet très délicat. L’Agéa notamment – le syndicat national des agents généraux qui travaille avec Axa, Generali, Allianz ou encore MMA -, a dernièrement écrit à l’ACPR pour expliquer que le geste du Crédit Mutuel envers ses assurés (200 millions d’euros de primes qui seront distribuées au total) n’est pas désintéressé. « Sous le vernis d’une communication solidaire exemplaire, le Crédit mutuel serait en train de désintéresser des assurés professionnels de l’application de garanties auxquelles ils auraient droits », a ainsi dénoncé Patrick Evrard, président de l’Agéa. Autant d’éléments qui montrent, une nouvelle fois, l’importance pour tous les chefs d’entreprises de faire examiner au plus vite leurs contrats d’assurances par un professionnel du droit.

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