« Moins de clients, mais plus, beaucoup plus de charges »

Le premier ministre va demander un effort fiscal supplémentaire aux grandes entreprises, tandis que le MEDEF est « prêt à discuter d’une hausse des impôts des entreprises ». Du côté des TPE et notamment des commerces, on n’imagine pas en revanche, être taxé plus encore. La situation étant déjà fortement préoccupante pour nombre de commerçants, avec des ventes au plus bas et des charges toujours plus élevées.

charges et impôts des commerçants
Illustration Michel Szlazak.

La nomination du nouveau gouvernement a ouvert la voix aux annonces des différents ministres et au discours de politique générale du premier d’entre eux, avec un sujet brulant : l’urgence budgétaire de fin d’année. Ou comment trouver quelques milliards, pour… creuser le déficit de “seulement” quelques milliards ! La situation financière est, nous dit-on, si grave qu’elle doit être rétablie au plus vite, ainsi le “quoi qu’il en coûte” risque fort de se muer en quoi qu’il en coûte… aux contribuables et donc également aux entreprises.

« Les dirigeants de TPE n’ont en aucun cas les moyens d’assumer un surcroît de charges sociales ou fiscales »

Patrick Martin, président du Medef l’a bien anticipé et annonçait la semaine dernière être prêt « à discuter d’une hausse d’impôts des entreprises ». Une annonce sous condition certes, « que l’effort demandé n’enraye pas la dynamique d’investissement et de création d’emplois », et que l’effort fait par l’Etat soit bien supérieur à ce qu’il demande aux entreprises. Quand bien même, cela ne passe pas du côté des syndicats de TPE. « Les propos du président du MEDEF se déclarant prêt à discuter d’une hausse d’impôts des entreprises n’engagent en aucune manière les TPE-PME, soit 98% des entreprises. Nos professionnels indépendants et dirigeants de TPE n’ont en aucun cas les moyens d’assumer un surcroît de charges sociales ou fiscales. Ils remboursent leur PGE (Prêt Garanti par l’État), peinent à faire face aux 14% d’augmentation du SMIC en deux ans le tout dans un contexte de baisse de la consommation. Sur les 12 derniers mois, ils n’ont jamais été aussi nombreux à devoir fermer leurs portes sur les 30 dernières années », tacle ainsi Marc Sanchez, secrétaire général du syndicat des indépendants (SDI).

Les fédérations du commerce réagissent en chaîne

Du côté du Collectif National de l’Équipement de la Personne (CNEP) qui regroupe plusieurs fédérations professionnelles de commerçants, telles que la FNH (habillement) et la FNDMV (maroquinerie), Jean Pierre Gonet, président de la Fédération des Détaillants en Chaussures de France (FDCF), alerte : « Cette année a été une véritable débâcle du commerce indépendant et plus particulièrement du secteur de l’équipement de la personne », et pointe outre le vieillissement des enseignes, des pures players toujours plus agressifs, l’émergence de la seconde main qui engendre forcément « une frugalité motivée par l’achat écoresponsable », ainsi que le niveau inédit de l’inflation qui a grevé le pouvoir d’achat. Résultat : « moins de clients, mais plus, beaucoup plus de charges et c’est bien là le problème », martèle-t-il.

« Le nouveau gouvernement, mais aussi les collectivités territoriales, ne peuvent plus “faire les poches” des petits commerçants, déjà vidées par des taxes foncières et des loyers toujours plus élevés »

La Fédération Nationale de l’Habillement pointe aussi une chute des ventes sur le premier semestre 2024. Dans les boutiques indépendantes, la baisse de chiffre d’affaires serait d’en moyenne 6% par rapport au premier semestre 2023. Inutile de dire que dans le secteur de la mode, et alors que l’hécatombe des enseignes se poursuit depuis près de trois ans, on n’est pas prêt, comme le propose le MEDEF, à discuter d’une hausse des impôts. Florence Bonnet-Touré, déléguée générale de la Fédération Nationale de l’Habillement, propose en revanche de « taxer plus les importations, car aujourd’hui, les produits à moins de 150 euros ne sont pas taxés en douane », afin de favoriser le made in France ou le made in Europe.

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Le nouveau gouvernement, mais aussi les collectivités territoriales, ne peuvent plus aller piocher dans les poches des petits commerçants, déjà vidées par des taxes foncières et des loyers toujours plus élevés. Et même si – pour l’instant – les TPE et PME semblent épargnées, « l’augmentation du SMIC, la réforme des allègements de charges sur bas salaire et l’extension aux TPE du partage de la valeur ajoutée sont autant de formes d’impôts déguisés sur nos entreprises » dénonce Marc Sanchez (SDI).

Côté industrie, il serait judicieux comme le souligne la FNH de taxer les importations à très bas coût, nuisibles à tout point de vue (environnement, économie, humain…). Et du côté de la distribution, il semble évident de mettre à contribution les grands bénéficiaires des nouveaux modes de consommation, Amazon et consort. A moins que les pouvoir publics s’en tiennent – enfin – à une devise bien simple : “On ne dépense pas ce que l’on n’a pas !”

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