Faut-il encadrer les loyers commerciaux ?
Les municipalités de Lyon et Bordeaux souhaitent encadrer les loyers des baux commerciaux. Une démarche soutenue par plusieurs fédérations de commerçants. Mais est-ce vraiment une bonne idée ?

C’est une réalité bien connue des commerçants. Entre un niveau d’activité en berne ces dernières années, et la hausse des charges fixes de l’autre côté, le poids du loyer n’a cessé de progresser. Une dynamique contradictoire, dans un contexte de vacance commerciale, qui pousse aujourd’hui certaines fédérations de commerçants et élus locaux à réclamer un encadrement des loyers commerciaux, comme cela peut exister pour les baux à usage d’habitation.
Dernière actualité en date, les villes de Lyon et Bordeaux, respectivement dirigées par les maires écologistes Grégory Doucet et Pierre Hurmic, ont écrit au gouvernement afin de devenir des communes test pour l’encadrement des loyers commerciaux. « Nous avons besoin de dire aux commerçants qu’il faut rééquilibrer les forces quand les professionnels voient leur propriétaire leur mettre une pression d’enfer sur les loyers », a justifié Grégory Doucet. Une telle mesure permettrait selon ces élus, de redonner des marges de manœuvre aux commerçants, afin notamment d’investir dans le développement de leur activité. Mais aussi de favoriser la diversité commerciale, en évitant la concentration des enseignes nationales, au détriment des commerces indépendants.
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Une initiative soutenue par les fédérations de commerçants
Au côté de l’élu écologiste lyonnais, Thierry Fontaine, président de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (UMIH) soutient ce projet d’encadrement des baux commerciaux. Ce dernier cible notamment les « foncières qui jouent avec les vies des entreprises sur des tableurs Excel, en augmentant parfois les loyers par trois quand les baux arrivent à leur terme », regrette-t-il.
Pour la Confédération des Commerçants de France, l’encadrement des loyers pourrait également permettre de débloquer quelque peu le marché. « Initialement, nous ne sommes pas favorable à ce type de mesure d’encadrement des prix. Pour autant, nous constatons aujourd’hui que de nombreux bailleurs se montrent incroyablement rigides sur les loyers, et préfère garder leur locaux vide plutôt que de baisser le prix. En ce sens, cette mesure pourrait permettre de faire entendre raison à ces bailleurs, qui ne resteront pas à attendre un hypothétique commerçant qui sera prêt à payer un loyer démesuré. Je pense en tout cas que cet encadrement mérite d’être expérimenté », partage ainsi son président, Pierre Bosche. Un argumentaire repris en parti par le maire écologiste de Lyon : « Si cela ne marche pas, on ne s’acharnera pas. Mais si cela marche, il ne faut pas s’en priver ».
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Une mesure contre productive pour les représentants des bailleurs
Du côté des représentants des bailleurs, l’initiative des élus bordelais et lyonnais est, comme l’on pouvait s’y attendre, assez mal accueillie. « Nous le voyons bien aujourd’hui, le plafonnement des loyers à usage d’habitation est un échec, dans la mesure où il fait détourner les investisseurs de l’investissement locatif », dénonce Jean-François Trably, président de la commission immobilier d’entreprise de l’Union des syndicats de l’immobilier (Unis). Les différentes études empiriques menées sur le plafonnement des loyers à usage d’habitation montrent effectivement que ce type de mesure a tendance à pousser les propriétaires à moins entretenir leur bien, mais surtout à rarifier l’offre locative, parfois assez drastiquement. Quand bien même elle permet à l’inverse de limiter significativement la hausse des prix. Ce que recherche justement les initiateurs de l’encadrement des baux commerciaux.
Mais pour Jean-François Trably, cette réponse n’est pas appropriée. « L’avantage que nous avons avec le bail commercial, c’est que nous sommes dans une liberté contractuelle. Si certains commerçants estiment aujourd’hui que le loyer devient une charge trop importante, et je veux bien l’entendre, ils ont la possibilité de négocier directement avec leur bailleur. En instaurant un encadrement, on casse cette liberté contractuelle qui est la marque de fabrique des baux commerciaux. Un propriétaire de murs n’a pas intérêt à ce que son locataire commerçant soit en difficulté, la porte des discussions n’est donc jamais fermée. Plutôt que de réglementer encore une fois, négocions de gré à gré », revendique-t-il.
Quelles sont les conditions pour solliciter une baisse de loyer ? Le prix du loyer ne se décide pas seulement lors de la conclusion du bail ou lors de son renouvellement. Le code de commerce offre également la possibilité aux bailleurs et aux locataires de procéder à une révision en cours de bail. Pour en savoir plus, consultez notre enquête dédiée, en cliquant ici.
Un argumentaire repris par la Fédération des Acteurs du Commerce dans les Territoires : « le commerce est une matière vivante qui, pour s’adapter aux évolutions des modes de consommation et aux attentes des clients, nécessite des investissements réguliers et importants, tant des bailleurs que des enseignes. Aussi, toutes les mesures ayant pour effet de décourager ces investissements apparaissent inefficaces et dangereuses ». Ajoutant par ailleurs : « la revitalisation des centres-villes passe, selon nous, par le développement de mesures incitatives, par la mise en avant d’outils ou projets développés par des villes qui ont su inverser des tendances ».
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Que décidera le gouvernement ?
Reste à présent à savoir quel argumentaire, celui des représentants des bailleurs ou des élus locaux, soutenus par les commerçants, sera retenu par le gouvernement de Sébastien Lecornu, qui doit être annoncé d’ici les prochains jours. Au vu de l’instabilité politique actuelle, cette question de l’expérimentation de l’encadrement des loyers commerciaux semble quoi qu’il en soit loin des préoccupations majeures. Il n’en reste pas moins que le débat est à présent ouvert.
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ENFIN ! Les commerçants sont devenus les vaches à lait de sociétés immobilières, qui de plus se déchargent ainsi des travaux d’entretien de leurs locaux hormis les gros travaux qui touchent l’immeuble, et très souvent de la Taxe Foncière ce qui ne devrait pas être autorisé ( un autre combat à mener ), une rentabilité exceptionnelle pour les propriétaires ! Il serait temps d’agir si on veut garder des commerçants qui croulent avec l’augmentation des charges fixes ! Bien sûr que l’encadrement des loyers commerciaux est une bonne idée de même que serait l’interdiction de faire payer aux locataires la… Lire la suite »
Il faut poser la bonne question « Faut-il réécrire le bail commercial qui date de 1953.
Après faites ce que vous voulez, on a le bail qu’on mérite