Shein visé par une action judiciaire inédite en France
Douze fédérations du commerce et de l’industrie, rejointes par une centaine de marques, ont annoncé une action en justice contre Shein pour « concurrence déloyale ». Une procédure d’une ampleur jamais vue dans le secteur, qui pourrait aller jusqu’à la fermeture de la plateforme en France. Le géant chinois dénonce quant à lui « une tentative de boycott ».

L’offensive contre Shein se poursuit, et cette fois-ci ce sont les professionnels qui organisent la riposte. Dans un communiqué commun publié le 19 novembre, les principales fédérations du commerce et de l’industrie, ainsi qu’une centaine de marques du secteur, ont annoncé avoir engagé des poursuites judiciaires contre le géant chinois en réparation pour concurrence déloyale.
« Depuis plusieurs années, les représentants du commerce français constatent la concurrence déloyale des plateformes en ligne extra européennes, telles que Shein ou Tému, dont le modèle repose sur le non-respect des réglementations applicables à tous les acteurs implantés en France. Ces pratiques massives mettent en danger la sécurité des consommateurs, fragilisent nos entreprises, détruisent des emplois, et menacent la vitalité des territoires », dénoncent-elles à l’unisson. Parmi les signataires du communiqué, on retrouve notamment le Conseil du Commerce de France (CDCF), l’Alliance du Commerce, la Fédération du Commerce et de la Distribution (FCD), la Fédération Française du Prêt à Porter Féminin (FFPAPF) ou encore la Fédération du e-commerce et de la vente à distance (FEVAD). S’y joignent également des enseignes nationales telles que Coopérative U, Promod, Monoprix, Grain de Malice ou encore Besson.
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Une action qui fait écho à celle entreprise dès le mois de juin par la Confédération des commerçants de France (CDF), accompagnée déjà à l’époque par plus de 230 enseignes et détaillants, qui avait appelé au déréférencement, voire au blocage, de Shein, Temu et AliExpress, dénonçant leur impact destructeur sur l’économie locale, la planète et le tissu commercial français.
Un avantage compétitif bâti sur des pratiques illégales
Pour appuyer leur démarche judiciaire, outre l’accusation de concurrence déloyale, les fédérations et marques mettent en avant le fait que « Shein a été condamnée à plusieurs reprises par les autorités publiques françaises et européennes pour des pratiques commerciales trompeuses (faux rabais, pression à l’achat, informations mensongères, opacité), des manquements aux obligations de conformité et de sécurité des produits, ou encore en raison de violation de la réglementation sur la protection des données personnelles ». A cela s’ajoute la découverte récente d’objets pédopornographiques ou encore d’armes en vente libre sur la plateforme.
« Grâce à ces manquements massifs et répétés, Shein a pu réduire illégitimement ses coûts, accroître ses profits et gagner des parts de marché au détriment des acteurs économiques implantés en France, respectueux des règles et de la sécurité des consommateurs », alertent à juste titre les représentants du commerce français.
Du côté du gouvernement, on se félicite de cette action. « Aujourd’hui, ce n’est plus seulement l’État qui agit, ce sont 12 fédérations et plus d’une centaine de professionnels qui exigent que Shein répare les dégâts causés par ses pratiques de concurrence déloyale », a réagi Serge Papin, ministre des Petites et moyennes entreprises, du Commerce, de l’Artisanat.
Une « accusation infondée » selon Shein
Face à cette mobilisation inédite du commerce français, Shein rejette fermement toutes les accusations. Interrogé par l’AFP, un porte-parole du groupe évoque une « accusation infondée », regrettant que les fédérations aient « privilégié la confrontation judiciaire plutôt qu’un dialogue constructif ». Selon la plateforme, « cette initiative s’apparente davantage à une tentative de boycott qu’à une démarche juridique sérieuse ». Dans un communiqué transmis aux agences de presse, Shein estime également que la procédure « s’écarte de l’esprit du droit français et européen de la concurrence, dont la vocation est de protéger l’innovation et d’assurer le libre choix des consommateurs – non de le restreindre ».
La bataille judiciaire est lancée
L’action en justice des organisations et marques françaises est portée devant le tribunal de commerce d’Aix-en-Provence, où ont déjà été assignées les « filiales irlandaises de Shein » pour « concurrence déloyale », dans le cadre de la liquidation judiciaire de la marque Olly Gan, a précisé lors d’une visioconférence de presse Cédric Dubucq, l’avocat des fédérations et entreprises concernées. Les représentants du commerce français « interviendront volontairement » lors de l’audience de mise en l’état programmée le 12 janvier à Aix-en-Provence, au cours de laquelle le calendrier de la procédure sera établi, avant une audience de plaidoirie attendue « d’ici douze à dix-huit mois », précise Mr Dubucq.
Avant cela, le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris sera amené à statuer le 26 novembre 2025 sur la suspension ou non de Shein en France. Cette demande de suspension intervient dans le prolongement de l’ultimatum lancé le 5 novembre par le gouvernement, qui avait accordé 48 heures à l’entreprise pour retirer de sa plateforme plusieurs contenus interdits, parmi lesquels des poupées sexuelles d’apparence enfantine et des armes relevant de la catégorie A. Si les produits illicites ont bien disparu du site, le Premier ministre, Sébastien Lecornu, a néanmoins rappelé que « le maintien des procédures judiciaires » demeurait indispensable.
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Une mobilisation citoyenne à amplifier
En attendant le résultats de l’ensemble de ces procédures, vous avez toujours la possibilité de relayer et soutenir la pétition pour l’interdiction de Shein ou l’instauration d’une taxe de 10€/article, lancée par lechommerces.fr. Car au-delà des premières mesures engagées, il reste encore des leviers à activer : application effective des textes, contrôles aux frontières,…
L’Assemblée nationale a déjà approuvé mercredi 19 novembre au soir la mise en place d’une taxe de deux euros ciblant les « petits colis » d’une valeur inférieure à 150 euros. Une taxe qui vise directement Shein, mais également les autres géants chinois du e-commerce, tels que Temu ou AliExpress. Mais rien n’est encore définitivement adopté, tant que le budget de l’Etat pour 2026 n’est pas voté.
Dans ce contexte, chaque signature compte pour maintenir la pression et faire entendre la voix des professionnels du commerce.
Pour rejoindre le mouvement et défendre une concurrence loyale signez la pétition ici
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